71127763Il arrive souvent que l’improvisateur-trice débutant-e « se bloque » et n’avance plus. Cette expression me semble assez juste…Car lorsqu’il-le ne trouve pas, ce n’est pas qu’il-le est entré-e dans un état avancé de transe méditative…Non, pas vraiment… C’est plutôt qu’il-le se bloque. Il-le s’auto-bloque. Il intercepte l’idée qui lui était premièrement venue. Ce n’est donc pas qu’il-le ne trouve pas, mais qu’il-le a trouvé et que ce qu’il-le a trouvé sort de son champ de possible.

Dit d’une autre manière, un peu plus simple : Une des difficultés, c’est d’accepter de lâcher prise sur la situation.

En thérapie, on dit parfois que les problèmes surviennent pour le client lorsque son conscient veut faire quelque chose que son inconscient aurait mieux fait. Et bien, un des défis de l’impro au début, c’est d’apprendre à ne pas faire. A ne pas être cohérent. A ne pas prévoir. A ne pas se limiter. A ne pas trouver le fil logique.

Et, au contraire, pour l’instant, prendre le premier fil venu.

Ce qui a pour effet d’élargir le champ des possibles.

Une option utilisable pour obliger à prendre le premier fil venu, c’est de réduire le temps de normalisation, le temps que passe la personne à filtrer ses pensées pour les faire rentrer dans le moule de l’acceptable.

En poussant à l’urgence.

Exemple d’exercices :

Faire commencer une impro à 2, l’interrompre lorsque les 2 participant-es ont des postures particulières en leur demandant de se fixer. Faire redémarrer immédiatement une impro qui n’a rien à voir. Agir ainsi plusieurs fois de suite.

Faire danser les participants sur une musique ad hoc. Interrompre la musique en figeant les participants et faire démarrer immédiatement une impro avec une sélection de 2 à 4 personnes particulièrement originales dans leur posture.

Dans ces deux handles, bien insister sur le fait que la posture est le point de départ et qu’il s’agira de la justifier ou de s’en servir pour faire quelquechose et qu’il faut qu’il y ait le moins de temps morts possible au moment de l’interruption.

Par l’urgence, on oblige à laisser faire celui qui sait déjà improviser, puisque c’est ce qu’il fait en permanence face aux situations nouvelles, l’inconscient.

La spontanéité n’est plus alors une qualité à acquérir ou à faire grandir mais une caractéristique déjà incluse à la base qu’il s’agit de dé-couvrir en la décortiquant des envies du conscient bien intentionné mais mal placé.

« Lorsque tu fermes ta main, elle peut contenir un peu de sable. Lorsque tu ouvres la main en t’endormant, elle contient tout le sable du désert. »

Proverbe persan (Ces proverbes de sagesse antique semblent toujours persans ou asiatiques de toute manière…Il n’y avait pas de sages gaulois ou wisigoths ? Y’a-t-il un sage auvergnat dans la salle ???)


2 réponses pour “Ké-blo !”

  • I beg to differ…

    Je suis d’accord avec l’idée qu’il faut pousser les élèves à accepter leurs propres idées (même si c’est à intégrer dans une démarche qui consiste à dire, peut-être plus tard, que toutes les idées ne sont pas bonnes, ne serait-ce que d’un point de vue narratif…).

    La méthode proposée, c’est de ne pas leur laisser le temps de réfléchir. C’est une méthode, certes, mais il est indispensable avant ça de les mettre en confiance et surtout de les faire travailler à accepter et même aimer l’échec (par ex: se tromper de mot, sortir une idée incohérente, etc…). Trop souvent, on néglige cette étape. D’autant plus que plus le rythme est rapide, plus c’est difficile de respecter la contrainte de l’exercice, quel qu’il soit.

    Une élève me confiait récemment sa frustration sur des jeux comme le jeu des « chaises musicales » que tu indiques où il faut commencer une scène dès que la musique s’arrête. Elle ne « sait pas quoi faire » et ça la bloque. La pousser à aller plus vite augmentera sa frustration… Dédramatiser l’échec et même le célébrer (ce qui est totalement contre-intuitif) est à mon avis le meilleur moyen d’aider les élèves.

    Je suis d’accord, donc, mais attention à établir un climat de confiance et d’acceptation de l’échec avant tout!

    A plus,

    Ian

  • Effectivement, travailler sur le fait que échouer c’est aussi avancer est indispensable à ce niveau.

    Une de mes citations préférées à ce sujet est celle-ci :
    «En essayant continuellement on finit par réussir. Donc : plus ça rate, plus on a de chance que ça marche.» [ Jacques Rouxel ] – Extrait de la BD Les Shadoks
    Les personnes dans mes ateliers l’entendent de temps en temps 🙂

    Mais j’ai bien en tête que la célébration de l’échec, c’est plus un climat général dans l’atelier qu’une chose qu’il faut ponctuellement redire.
    Pour cela, je participe aux exercices que je propose, (Généralement après tout le monde.) tout en donnant aux élèves qui regardent les clefs pour critiquer.
    Je pense que à ce point, il-les ont compris qu’on peut être avancé et pourtant rater l’exercice. Et je les vois au fil de l’année, bien moins découragé-es que dans les 2-3 premiers cours.

    Il y a aussi à saisir que l’échec est relatif et qu’il faut savoir recadrer la personne lorsqu’elle dit qu’elle a « Tout raté ». Habituer au feed-back en sandwich est un bon vaccin contre ce genre de pensée d’ailleurs (Sur une exercice, il est impossible d’absolument tout rater!!!)

    Quel(s) moyen(s) utilises-tu pour changer le statut de l’erreur dans tes cours?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *